samedi 4 août 2012

Hou hou, ha ha

J'imagine le néandertalien voyant passer un invraisemblable troupeau de gibier appeler les membres de son clan par une sorte de cri sonnant comme un hou hou, ha ha.

Mais forcément, ils sont trop loin. Alors il décide de trouver un moyen pour donner à voir la scène aux absents.

Le pouvoir de l'image est effrayant. Une vidéo emporte tout sur son passage, comme un tsunami informatif. Elle dit désormais a des millions d'êtres humains ce qu'ils doivent croire et ce dont ils feraient mieux de douter. Plus efficacement encore que les choses écrites.

Ces images balaient aussi les millénaires qui nous séparent de cette époque où, dans une évolution chaotique, nos ancêtres se mirent à se dresser sur leurs pattes arrières, affranchissant leurs membres supérieurs de la corvée de la balance des deux autres inférieurs pour leur laisser cette liberté précieuse : manger avec les doigts ou tremper ces derniers dans des pigments afin de maculer la pierre de dessins, puis de signes et enfin d'écritures.

Ensuite, des siècles d'évolution permirent à l'espèce de faire tri entre ce qu'il était bon ou mauvais de transcrire. Johannes Gutenberg finit par mécaniser le dispositif, mais l'homme étant souvent illettré et toujours pressé, il ne fallut pas attendre des millénaires pour que la transmission radiophonique puis audiovisuelle s"impose.

Et puis nous voilà, avec nos tablettes, notre écriture tactile, nos systèmes de reconnaissance vocale qui déclenchent la vidéo de nos terminaux portables et leur partage avec nos semblables.

Bref, l'humanité a fait de sérieux progrès : quand on voit passer un invraisemblable troupeau de gibier, plus besoin d'apprendre à dessiner ou à écrire. On gribouille sur nos ardoises ou on prononce le mot qui convient afin qu'elles dessinent la scène à notre place. Ensuite, on clique pour rameuter les troupes. Même plus la peine de gueuler un hou hou, ha ha.