samedi 28 janvier 2012

Messe

Exceptionnellement, ce week-end, la messe dominicale sera ouverte à 20 h 15.

Alors évidemment, quand le Sauveur aura fini d'expliquer comment il va renvoyer le diable des marchés brûler en enfer...

Quand il aura démontré qu'il est en mesure de rendre les cieux de l'emploi immédiatement plus sereins...

Un noble serviteur de l'information aura l'outrecuidance spontanée de l'interroger sur son entrée en campagne...

Le Sauveur prendra le temps de l'humilité et du recueillement. Celui qui sépare l'acte de contrition et celui de candidature.

" Comment pouvez-vous imaginer un seul instant que mon propre sort puisse m'intéresser davantage que celui de la France ? "

" Tant de gens souffrent. Leur avenir transcende le mien ", ajoutera le Sauveur.

" Je ne suis pas candidat à la présidence de la République. Je suis candidat à la survie de la France. "

Reste à savoir combien de fidèles se prosterneront devant le Sauveur.


vendredi 27 janvier 2012

Président-people

Est-ce que la Ve République est par nature celle du président-people ?

Pierre Sudreau avait une réponse à cette question. Il était le dernier survivant de ceux qui ont apposé leur signature au bas de la Constitution. Grand résistant, ancien maire de Blois, ministre de la Construction à 39 ans (il était alors le cadet du premier gouvernement), il est mort le 22 janvier. Un dernier hommage lui a été rendu ce 27 janvier aux Invalides.

Il m'avait accordé une interview pour la Nouvelle République (malheureusement disparue du Web en changeant de site) en octobre 2008, à l'occasion du cinquantenaire de la Ve. Son regard était caustique. Et ses mots restent terriblement d'actualité. Pour lui, le 4 octobre 1958, le président de la République n’était pas appelé à devenir une star.

" Je trouvais que l’idée de faire élire le chef de l’État par un collège composé d’élus qui avaient fait leurs preuves en politique (80.000 grands électeurs, députés, sénateurs, conseillers généraux, maires...) était un gage d’équilibre des pouvoirs. "

Ce système avait porté, le 21 décembre 1958, Charles de Gaulle à la fonction suprême, mais il ne satisfaisait toutefois pas le général.

" Je crois qu’il avait une inquiétude, une angoisse dans sa relation avec les Français. Il pensait que le suffrage universel direct serait pour lui une sûreté, une garantie. "

En 1962, le référendum organisé par Charles de Gaulle permet d’introduire dans la constitution l’élection au suffrage universel direct du Président. Pierre Sudreau y était opposé. Il démissionne.

" A l’époque déjà, étant donné le pouvoir grandissant des nouveaux instruments de communication, j’étais convaincu qu’on risquait de se retrouver avec n’importe qui à l’élection présidentielle, y compris et surtout ceux qui savaient manipuler l’opinion publique, sous l’influence de groupes et des puissances de l’argent (...) et assujettis aux soubresauts de l'actualité. "

Brutes épaisses

Sous quel régime vit-on ? Une dictature : celle de la balance. D'ailleurs, François Hollande aurait gagné des points en perdant du poids.

David Pujadas :
" Une stratégie de com’? "

François Hollande :

" C’était pour être en harmonie avec moi-même. "

Bref : du lourd dans le débat politique. La faute à Pierre Dukan ? C'est vrai qu'il a balancé des noms au grand journal et demandé aux candidats de faire de la réduction de la charge pondérale des Français une priorité nationale.

Mais ça n'est pas la première fois que les bourrelets présidentiels viennent peser sur le débat politique : on se souviendra avec émotion de cet été 2007 où Paris Match avait gommé les poignées d'amour de Nicolas Sarkozy. La suite, on la connaît : Julie Imperiali en a fait ses choux gras.

C'est comme ça : les candidats doivent être intelligents et minces. Et les électeurs ? Gros et cons ? Une question à laquelle Sophia Aram et Guy Carlier ou encore Didier Porte avaient essayé de réponde.

Quand la politique manque de légèreté, dans ce monde de brutes épaisses, quelques grammes de finesse ne peuvent pas faire de mal.

mercredi 25 janvier 2012

Doute

Stéphane Guillon à Nadine Morano :

"Danger de mort ! Amis piétons qui êtes sur Tweeter. Demandez tous à Morano où elle va rouler demain pour éviter le secteur !"

Nadine Morano en réponse à Stéphane Guillon :
"Ah si on pouvait rouler sur votre bêtise ça ferait du bien quelquefois !"

Voilà une conversation légère, presque anodine entre deux égos surdimensionnés sur un fait divers qui a bien failli coûter une vie, mais fort heureusement, elle est sauve.

C'est un tweet de @krstv qui a attiré mon attention et je me suis mis à essayer de comprendre. Rien de personnel. Je n'éprouve - personnellement et professionnellement - aucun sentiment à l'égard des politiques : je les observe.

J'ai comme tout le monde vu le phénomène apparaître et j'ai dit, comme toujours et quand bien même l'intéressée promettait le contraire, le fond de ma pensée.

L'incident aurait pu être clos en ce qui me concerne, car je ne suis pas monomaniaque. Sauf que là, j'ai trouvé particulièrement anormal qu'alors que @krstv lui posait des questions de fond sur cet accident, Nadine Morano choisisse de les ignorer au profit de cette petite joute douteuse avec un humoriste sulfureux jouissant d'une grande notoriété, du genre de celle qui peut vous faire accroître la votre.

D'autant qu'en essayant de comprendre l'empressement de la ministre à rejoindre Toul en demandant à un très cher confrère ce qu'elle avait de si important à y faire, j'ai compris qu'il n'y avait pas péril en la demeure. Puisqu'il avait si bien commencé le travail, cette information je l'ai transmise à @krstv, qui a poursuivi l'interview comme il se doit.

Me voici presque au milieu de la nuit à refaire ce film de série B et à douter de tout.

Je doute que le rôle d'un ministre de la République soit de venir sur Twitter pour se contenter d'y brasser de l'air.

Je doute qu'un chef de gouvernement digne de ce nom puisse laisser un de ses ministres s'égarer à ce point, tout comme je doute qu'un président de la République ne trouve rien à y redire.

Et tant qu'à faire dans le doute, je préfère encore croire que ces faits ne sont pas avérés.

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Mise à jour du 25 janvier 2012 à 11 h 35 : des précisions et les explications de Nadine Morano sur lci.tf1.fr et sur estrepublicain.fr

mercredi 18 janvier 2012

The day after

Ce 18 janvier 2012 restera marqué dans l'histoire de la vie politique française.

Nicolas Sarkozy, que l'on attendait sur l'annonce d'un nouveau plan de rigueur consécutif à l'abaissement de la note française, a retrouvé sa marque de fabrique et son coeur de métier : créer la surprise. Indépendamment des faits et des actes. Tant que l'annonce est forte, dans cette société de la mémoire courte, ça suffit : l'électeur oublie souvent de vérifier si les effets sont au rendez-vous des promesses.

Ainsi donc, ce 18 janvier 2012, tandis que François Hollande hésitait encore sur la façon de conjuguer relance de l'emploi et crise économique mondiale, Nicolas Sarkozy lui a volé la politesse d'un programme social en faveur de la France silencieuse qui peine en et dont c'est d'ailleurs la première préoccupation, bien devant l'insécurité, terrain déjà largement labouré, défriché et maintenant fertile. C'est bien joué.

Voilà qui va rendre au candidat de la majorité - certes réputé hésitant le matin devant le miroir de sa destinée - ces quelques points qui s'étaient étiolés au fil des dérives sécuritaires et libérales, que ses ministres assument désormais parfaitement à sa place.

Bref : de quoi envisager l'accouchement du premier tour de cette présidentielle 2012 sous les mêmes auspices qu'en 2002, ce que je ne cesse de répéter depuis un moment.

Cela dit, après la présidentielle : les législatives. J'imagine déjà le peuple de gauche qui, se sentant dupé, bafoué, outragé - comme souvent - trouve l'intelligence sur le tard - comme toujours - de s'unir pour porter une vague rose à l'Assemblée nationale, doublant ainsi celle du Sénat.

Le retour à la cohabitation ! Drôle de scénario. On appellerait le film The day after 6 mai 2012.

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D'ailleurs, il s'est mis après la publication de ce billet à causer peuple.

mardi 10 janvier 2012

Arsenal

Après tout, on s'infuse tellement d'analyses politiques à deux balles et de sondages foireux que j'ai bien le droit de lancer une enquête d'opinion auprès de moi-même pour répondre à la question : qui a vraiment peur de la candidature d'Éric Cantona : François Hollande, Nicolas Sarkozy ou Marine Le Pen ?

100 % des personnes interrogées ont répondu Nicolas Sarkozy. Et quand nos sondeurs leur ont demandé d'expliquer leur choix, elles ont répondu que si Cantona allait jusqu'au bout, il piquerait tellement de voix au FN que la fille Le Pen serait absente au second tour.

Or, comme notre panel a déjà eu l'occasion de le dire dans un précédent sondage, Nicolas - mais il n'est pas le seul - compte bien sur un choc frontal avec la petite Marine pour liquider la concurrence.

Cantona risque donc fort de se retrouver seul dans le match contre un arsenal qui n'hésitera pas à jouer la faute.

vendredi 6 janvier 2012

Excuses

J'ai reçu des excuses aujourd'hui. Sans importance. D'un adulte, ça m'a surpris. Je n'accepte que celles des enfants.

Je considère qu'eux seuls peuvent croire qu'il suffit d'en présenter pour obtenir un pardon. Parce que le monde ne fait que commencer à se défiler devant eux.

Je les leur accorde avec parcimonie, tout en m'efforçant de leur expliquer qu'à mesure des ans qui s'ajouteront, ils en trouveront moins.

Les excuses sont une ineptie. Le pardon une lâcheté pour présenter les siennes. Je n'ai jamais cru au aux produits nettoyants de la conscience.

J'ai au contraire la conviction que dans le livre de comptes de nos vies, tous les actes sont inscrits. Les uns à l'actif, les autres au passif, sans jamais que nous puissions avoir la certitude qu'ils ont été reportés dans le bonne colonne. Juste l'espoir qu'ils l'auront été sans erreur.

Je suis certain qu'on ne peut rien effacer. Ni le bien, pris ou reçu ; pas plus que le mal consenti ou volé.

Tout est gravé. Inaltérablement. Car si nos excuses devaient valoir absolution, ça ne vaudrait même pas la peine de les présenter.

mercredi 4 janvier 2012

Consensus

Ils ont encouragé d'un commun accord le démantèlement du charbon, du textile et de l'acier, juste parce que ces industries ne produisaient pas au moins 10% de dividendes. Maintenant ils pleurent devant la mondialisation.

Ils ont aboli dans un même élan la conscription et le droit aux enseignants de mettre des baffes aux sales gosses. Et ils ne comprennent plus pourquoi les sauvageons ont poussé de travers.

Ils se sont entendus pour aligner les échéances présidentielle et législative. Et les voilà qui commencent à sentir que l'hyperprésidence, ça motive peu les électeurs.

Ils sont d'accord pour jouer ensemble aux petites phrases pour décider de l'avenir de la nation, tout en sentant que ça ne va pas nous mener bien loin.

Et soudain, ils sont pris de regrets. Ils finiront peut être par se rendre compte que ce qui les étouffe aujourd'hui, ce sont leurs consensus d'hier.

dimanche 1 janvier 2012

Navigateurs

Le Web n'est pas un océan immatériel, sans carte, compas ni trésor, où ne navigueraient que des flibustiers et d'audacieux capitaines avides de nouveaux mondes. La toile est tissée d'os, de chair et de sang et l'idée selon laquelle ce qui s'y vit est irréel est un fantasme.

Ici s'expriment des humains, qui retranscrivent leur réel ou qui viennent ajouter à l'expérience du leur celui que les autres ont numérisé.

Un seul clic les sépare, comme un battement de paupière. Celui de la diffusion et de la prise de connaissance. Émission, réception : c'est le même geste. Une pression de l'index comme sur la détente d'une arme pointée vers l'autre ou retournée contre soi-même.

On se tue à comprendre des choses que certains se crèvent à essayer de nous expliquer. Et vice-versa. Ça a toujours été comme ça. C'est l'histoire de l'humanité. Scribes, saltimbanques, imprimeurs, peintres, conteurs, cinéastes, éditeurs, photographes, auteurs de best sellers ou de billets perdus au plus profond du Net, de grands reportages ou de mots couchés sur l'intimité des pages d'un journal caché.

L'homme n'a pas inventé les mots pour qu'ils s'envolent, ni les images pour être effacées. Il ne les produit pas pour lui-même, tout en ignorant la liste des destinataires, ni même s'il en existe un seul. Il glisse des messages dans de fragiles bouteilles qu'il envoie à la mer sans savoir où elles échoueront, couchées par la marée sur une plage de sable fin où brisée contre les roches d'intraitables abysses. Et ça, nos navigateurs ne nous l'indiqueront jamais.