dimanche 24 octobre 2010

Signes

Ecrivez ! Tout de suite, maintenant, des tweets, des billets de blog, des lettres d'amour, des confidences. Qu'importe : écrivez

Cherchez à comprendre, à analyser, à décortiquer, à vous interroger, à déranger les apparences, les choses données pour vraies

Traquez la vérité en vous même. Menez cette même investigation ailleurs, avec autant d'exigence, sur les autres, le monde

Aimez les mots, les verbes, les conjugaisons et les accords, les sujets et les objets autant qu'ils vous ont appris à aimer

Que vous le fassiez avec un stylo ou un clavier n'a aucune importance. Pas plus que vous soyez journaliste ou écrivain

Que ces mots soient publiés ou qu'ils restent confidentiels ne changera rien à l'affaire tant que les bons destinataires les liront

Ne renoncez jamais devant la difficulté : il reste toujours une somme infinie d'espaces vides qui attendent vos caractères

Qu'elle soit épistolaire, littéraire, informative, distrayante, pénible, introspective, ou extravertie, libérez votre plume

Trouvez la force, l'envie, le courage de chercher les mots qui donnent un sens, qui vous construisent

J'ai dû écrire, avec une marge d'erreur de + ou - 10 % quelque 32.850.000 signes depuis ma naissance. Ma vie tient en 32.850.000 signes

Je n'aurais pas assez du reste de ma vie pour relire mes lignes et ça n'est pas la peine. Elles m'ont menées sûrement vers un monde meilleur

jeudi 21 octobre 2010

Fil

Vous êtes des centaines de braves gens, de filles bien, de chics types, d'êtres humains avec un coeur dedans, au moins

Vous m'avez donné un coup de main et c'était pas facile. Non pas que vous soyez réticents : j'ai vu que vous avez le coeur sur la main

Non. C'était moi qui hésitait à vous demander. Vieille déformation judéo-chrétienne de l'humilité qui vous pousse à ne jamais rien réclamer

Mais j'ai surmonté parce que c'est du bonheur d'une famille dont il s'agit. Mon premier fils dont je suis séparé et qui me manque sans cesse

Ce grand que son petit demi-frère et que sa petite demi-soeur aiment au delà de toute fraternité, même quand il n'est pas là

Mais bon. Il est loin et c'est de ma faute, probablement, parce que j'ai choisi de recomposer ma vie et forcément leur vie aussi

Et comme dans toutes les familles recomposées, pour se rassembler, il faut tailler la route, réduire l'espace-temps

Sauf que c'est compliqué quand il y a grève des transports, pénurie de carburants. Je n'ai pas pas de carrosse ni de cheval

Alors oui, devant la menace d'un désordre affectif à cause d'un conflit social, on peut penser au gréviste comme exutoire

Je n'ai pas fait ce choix. J'ai cherché ailleurs. Je me suis demandé tout bonnement comment survivre et j'ai pensé à vous

Car il se noue ici des solidarités nouvelles. Elles permettent de dépasser les clivages d'un conflit qui déchire nos quotidiens

Une façon accessible à chacun de sortir du manichéisme, des haines sociales dans lesquelles certains rêvent de nous enfermer

Oui, vous, les gens qui me lisez et que je lis, les personnes qui m'interrogent, qui me donnent aussi des réponses, et vice-versa

Je me suis dit que je devais, qu'il fallait que je vous demande un coup de main, en m'asseyant sur mon orgueil parce que c'était important

Vous m'avez aidé. Et voilà, pour ces vacances, maintenant, grâce à votre aide, les enfants pourront à nouveau rire ensemble

Je les entends déjà. Ces rires de bonheur, je veux déjà les partager avec vous. Arnaud, Laurence, Alexandre, Rajae et tous les autres

Vous êtes des centaine à avoir accordé quelques secondes de vos vies à rendre ces instants éternels possibles

Juste grâce à un clic, quelques caractères bien frappés, un appel rassurant. Nos vies ne tiennent qu'à un fil, celui qui nous relie

Juste, encore une fois : merci à vous tous d'être là

Twitstory du 21 octobre 2010 sur la TL de @christreporter

jeudi 14 octobre 2010

Hyperliens

Aujourd'hui, j'ai relu ma toute première #twitstory et ça m'a fait tout drôle, comme quand on retrouve une vieille chose

Pourtant, elle ne date que du 8 juin. Mais comme le dit mon amie Léonor "A l'échelle de Twitter, six mois c'est une éternité..."

Je me souviens, au milieu du récit, j'ai vu le compteur des "followers" passer à 666 et j'ai eu peur de devenir antechristreporter


Alors j'ai compté. En six mois, j'ai écrit 58 histoires et vous êtes un millier à avoir choisi de me rencontrer et de rester fidèles

Vous êtes je ne sais qui ni combien à avoir consulté 16.500 fois les pages de ce petit blog où je ces histoires reposent

J'ai reçu des milliers de messages, publics ou privés, de personnes célèbres ou d'inconnus qui m'ont fait chaud au coeur

Des mots qui m'ont encouragé dans ce délire, dans cette conviction que nous devons laisser ici, dans cette espace numérique, des traces

Des témoignages de ce que nous sommes vraiment et qu'un jour ceux qui nous survivront pourront lire, comme des bouteilles à la mer

Pendant ces semaines, je n'ai cessé de m'interroger sur la nature de ces liens numériques qui nous unissent

Je crois que j'ai compris : "followers" et "followings" ne restent durablement ensemble que par l'attention, le respect mutuel

Twitter n'est "chronophage" que pour ceux qui y perdent leur temps, leur âme, leurs amours, leurs amis

Moi, à chaque fois que j'y mets les pieds, c'est avec ce plaisir qu'on peut avoir à s'asseoir à la terrasse d'un bistrot

A chaque fois, c'est une surprise. Je ne sais pas si je vais rester là tout seul ou causer avec les gens des autres tables

On attache les boeufs avec la corde, mais url comme irl les hommes avec la parole. Les mots qu'on se dit, ce sont les vrais hyperliens


Twitstory du 14 octobre 2010 sur la TL de @christreporter

mardi 12 octobre 2010

Les lendemains qui déchantent

Voilà. Faut que j'explique un truc que les vieux connaissent, mais que les plus jeunes d'entre-vous ignorent peut-être

Alors. Bon. Par où commencer ? Oui : je suis né dans les années 60 dans le Nord. L'acier, le charbon, le textile

J'ai grandi sur cette terre où, le 30 avril 1891, des soldats ont testé le fusil Lebel sur des guesdistes qui préparaient le 1er mai

J'ai pas mal vu, vécu, subi, suivi, agité, couvert et même déclenché - ça m'est arrivé une fois - de conflits sociaux, de grèves générales

J'en ai tiré une certaine expérience et des leçons. En l'occurrence, j'ai découvert la dialectique de la patronne et du patron

Le patron, c'est celui contre lequel on se bat. Acception large : l'économie mondialisée, le pouvoir, ce qui nous gouverne et nous dépasse

La patronne - héritage de mes terres prolétariennes - est l'épouse qui gère le budget. Acception contemporaine : le solde du compte en banque

Quand l'ouvrier rentrait d'une nouvelle journée de grève contre son patron s'ouvrait un nouveau conflit avec sa patronne

Genre : "C'est bien beau tes histoires de revendications et de défense des droits acquis, mais faut faire bouillir la marmite"

Rien n'a vraiment changé. Une grève ne dure que tant que les grévistes ont les moyens de faire grève

Beaucoup auront le courage de se mettre en danger, de convaincre leur patronne et leurs enfants de les suivre dans le sacrifice de la lutte

Les plus déterminés iront jusqu'à bouffer du rat crevé pour emporter la victoire, parce qu'ils croient qu'elle porte des jours meilleurs

Et comme toujours, ces héros de l'ombre disparaîtront dans l'oubli. Leurs efforts profiteront à une élite à l'abri du besoin

Mais si encore une fois ceux qui ont choisi de ne pas rebrousser chemin doivent être perdus en route, on aura atteint le point de non-retour

La veille d'une bataille, faut penser aux lendemains qui déchantent

Twitstory du 12 octobre 2010 sur la TL de @christreporter

vendredi 8 octobre 2010

Nos larmes

Je n'ai pas envie de vous raconter cette histoire. J'ai tellement cru qu'on pouvait apprendre à aimer vivre autrement

J'ai longtemps cherché la mort. La violence, les coups, les larmes et la tristesse ont pavé les sentiers de mon enfance

C'est un chemin qui se dessine comme à l'infini. Un puits qu'on pressent sans fond. Mais on finit toujours par toucher le dur

Ce moment d'absolu désespoir où on sait qu'on a plus peur d'en finir pour de bon, où la fenêtre du 18e étage devient un espoir

Oui, j'ai un jour tenté de mettre fin aux miens. A cause d'une successions d'amours impossibles, de renoncements, de peines, d'abandons

Je me suis retrouvé suspendu dans le vide, retenu par la force de ce que je ne voulais plus vivre

Je ne sais pas comment on ne se relève de ce genre d'épreuve. On met des années à s'en remettre, à ressasser des questions

On ne s'en tire vraiment qu'en harcelant sa propre conscience. On ne revoit la lumière qu'en traversant l'obscur

On verse l'océan des larmes de son corps jusqu'à plus soif. On y noie ses démons. On apprend même à remonter à la surface

On trouve soudain une aisance. On surnage. Puis on nage. On respire. On vit. Oui, nos larmes nous portent

Nous nageons dans cet océan de larmes, oui, et c'est en refusant de les pleurer qu'on risque de s'y noyer

Twitstory du 8 octobre 2010 sur la TL de @christreporter

jeudi 7 octobre 2010

Dubito

Je sais pas bien ce qui se passe. Ou plutôt je le sais mais je ne veux pas l'admettre. J'ai des certitudes qui vacillent, encore une fois

Pas envie de caricaturer les faits et les gens, encore plus que d'habitude. J'ai parfois du mal à séparer les méchants des gentils

Je sais pourquoi en fait. Hier midi j'ai rencontré un membre de ce gouvernement qui nous pourrit la vie et j'ai senti les doutes m'assaillir

Et pourtant ça va, c'est bon, hein : je suis pas né de la dernière pluie. Je suis un vieux routard de l'info et j'ai mes cartes

Les techniques de com, les éléments de langage, les stratégies cachées... Tout ça, c'est bon, j'ai déjà vu. C'est pas ça en fait

Je suis déstabilisé du haut de mes 44 printemps, parce que j'ai rencontré quelqu'un qui a une force plus grande que la mienne

Quelqu'un qui s'est engagé, certes, dans un camp que je déteste, mais qui a la conviction qu'il fallait le faire

Moi j'en suis incapable. Je me réfugie sans cesse dans l'appartenance à rien. Ni dieu, ni maître... personne. Je m'oppose à tout pouvoir

Mais j'ai compris ce qui me turlupine dans cette rencontre. Je suis admiratif. Je suis capable d'admirer ceux qui s'engagent

Même si ça n'est pas ma tasse de thé, mon camp, mes idéaux, je peux comprendre. Il peut y avoir de l'autre côté cette culture

L'entrisme. Noyauter un groupe de pouvoir pour en changer l'orientation. Culture marxiste-léniniste, pardonnez-moi, j'ai été élevé à ça

C'est assez vertigineux. C'est un truc qui théoriquement peut pousser un trotskyste convaincu à entrer à l'UMP pour en infléchir la ligne

Ou un ultra-libéral à militer chez les alter-mondialistes pour les convaincre de l'inutilité de l'Etat-providence


Enfin bref. Je me suis un peu perdu dans mes doutes en rencontrant Rama Yade, en essayant de comprendre ce qu'elle faisait là, à l'UMP

Je ne suis pas dupe. Elle n'est qu'une caution. J'ai juste pas envie dans cette guerre politique de faire des dégâts collatéraux

Quelle que soit l'issue de la bataille qui va s'ouvrir, il y aura des bons et des méchants de chaque côté. Faudra se poser la question

Rama a fait vaciller un instant mes certitudes et c'est tout ce que je vais retenir. Si j'arrête de douter, je suis mort

Twitstory du 7 octobre 2010 sur la TL de @christreporter

vendredi 1 octobre 2010

Voyages intérieurs

Je sais pourquoi j'adore les lumières électriques : elles me rappellent la chambre sans fenêtre de mon enfance

J'ai choisi de ne plus refouler de ma mémoire le décor de cet hôpital où ma femme a frôlé la mort, parce que ça me privait d'autre chose

Cela m'interdisait presque de revoir ces instants où, dans ce même lieu, un de mes enfants venait au monde

Je sais pourquoi j'aime les couteaux : c'était un des outils de travail de mon père. Un moyen de nous menacer aussi quand il était en colère

On peut se retourner sur sa vie en choisissant de ne retenir que le meilleur et de chasser le pire. On peut réécrire l'histoire

Il est possible aussi de profiter de ces périples dans la machine à remonter le temps pour partir à la recherche de ce qui cloche

Les petites zones d'ombres, les recoins obscurs, les sens interdits, les chemins de traverse ne font pas partie du programme officiel

Mais dans ces voyages intérieurs, ils conduisent plus efficacement à ce paradis perdu, ce lieu où on peut vivre en paix avec soi-même

Twitstory du 1er octobre 2010 sur la TL de @christreporter